France 2030 toujours face au dfi territorial

Publish date: 2024-06-07


9.000 km de voies ferrées sont aujourd'hui fermées en France. Soit un tiers du réseau ferroviaire. Partant de ce constat, le groupe alsacien Lohr a eu l'idée de confectionner un train léger de la taille d'un bus, pour redonner vie aux petites lignes régionales. Le projet baptisé Draisy est mené par un consortium lancé en 2019 avec la SNCF. Il fait partie des nombreux projets sélectionnés dans le cadre du plan France 2030. Ces lignes n'étant pas électrifiées, le train fonctionnera avec des batteries rechargeables en gare. "Dans quatre ans, la promesse est que ce train soit commercialisé", a indiqué Marie-José Navarre, vice-présidente du groupe Lohr, lors des deux ans de France 2030, sur le site d'Airbus, à Toulouse. Le consortium nourrit une double ambition : travailler sur l'ensemble de la chaîne – des infrastructures à l'exploitation, des véhicules à la règlementation – et "inclure le maximum de composants issus de l'industrie automobile". "On dit quelquefois que Draisy a quelque chose de la micheline d'André Michelin (…) mais ne vous y trompez pas, Draisy, c'est la génération Alpha", s'est enthousiasmée Marie-José Navarre, devant un parterre de chefs d'entreprises bénéficiaires du plan. En 2024, les premiers essais seront réalisés dans le Grand Est. Un partenariat est également noué avec la région Occitanie pour "travailler sur de nouvelles solutions, de nouveaux usages"…

60% des projets concentrés dans trois régions

En mettant en avant cet exemple, le secrétaire général pour l'investissement (SGPI) qui pilote France 2030, a voulu montrer les retombées pour les territoires, alors que les collectivités critiquent souvent son trop grand éloignement. "L'innovation c'est aussi une manière de réaménager (le territoire)", a d'ailleurs souligné Bruno Bonnell.

Deux ans après avoir lancé ce grand plan aujourd'hui doté de 54 milliards d'euros, Emmanuel Macron a exhorté les chefs d'entreprises à aller "plus vite et plus fort", dans le contexte de concurrence féroce avec la Chine et les Etats-Unis. "L'IRA (Inflation Reduction Act, ndlr), c'est la politique de subventions la plus forte depuis l'après-guerre, elle n'est absolument pas compatible avec les règles de l'OMC, mais nous n'avons pas le temps de faire du contentieux", a-t-il dit. Dans ce contexte, France 2030 doit être le "catalyseur de l'accélération" autour de trois objectifs : la souveraineté industrielle, le plein emploi et la décarbonation. Depuis son lancement du plan en 2021, la moitié des crédits du plan a été engagée, qui a permis de soutenir quelque 3.200 projets sur près de 5.000 sélectionnés à ce jour. "60% de ces financements ont été alloués à des projets hors Ile-de-France", s'est félicité Emmanuel Macron, citant l'exemple de l'Occitanie qui a reçu 1,2 milliard d'aides pour 468 projets. La région, elle, a apporté 950 millions d'euros, soit 80% des crédits de l'Etat, se félicite-t-elle, dans un communiqué. Il reste que les projets sélectionnés sont très inégalement répartis : l'Ile-de-France en concentre 1.800, devant Auvergne-Rhône-Alpes (743). A elles-deux, ces régions regroupent plus de la moitié des projets, 60% si on y inclut l'Occitanie. Seule la Nouvelle Aquitaine parvient à dépasser les 300 projets, toutes les autres se situent entre 100 et 269, sauf la Corse qui en compte 13.

Depuis le premier anniversaire du plan, le rééquilibrage et la plus grande "territorialisation" promise par la Première ministre, avec la désignation de sous-préfets spécialisés (voir notre article du 18 novembre 2022), n'a donc pas eu lieu. C'est "la règle absolue de l'excellence" qui a prévalu, a insisté Bruno Bonnell, précisant qu'un dossier sur trois seulement avait été retenu. Pour Carole Delga, présidente de la région Occitanie, "cette réindustrialisation ne se fera pas sans les territoires. Emmanuel Macron et son gouvernement doivent nous faire confiance et travailler avec nous pour donner l’élan nécessaire. Nous devons aussi agir collectivement pour que l’Europe adopte les règles favorables à cette ambition". La présidente de Régions de France demande "la délocalisation des moyens financiers afin d’avoir un processus rapide et adaptable pour aider les entreprises".

"Plus de rapidité publique"

Dans son discours, Emmanuel Macron a promis "plus de rapidité publique", avec des mesures gouvernementales "très concrètes", "dès le début de l'année prochaine" en faveur d'une "simplification drastique" pour les entreprises, et ce "dans tous les domaines". Selon lui, la complexité devra "se justifier". Ce qui va dans le sens du "projet de loi Pacte II" déjà annoncé par le ministre de l'Economie Bruno Le Maire pour 2024. "On ne peut pas avoir des procédures qui sont deux fois plus longues que nos concurrents américains et asiatiques", a insisté le chef de l'Etat.

Il a aussi demandé aux chefs d'entreprises de "travailler beaucoup mieux avec nous sur les projets clés en main". "C'est ce qu'on doit continuer de développer avec les métropoles, les villes, les régions", a-t-il dit, prenant l'exemple de Dunkerque où, pour la vallée de la batterie, un travail de cartographie des friches et des sites avait été réalisé en amont. "Aujourd'hui, nous collectivités publiques, nous sommes trop lents", a-t-il déploré.

Emmanuel Macron a aussi annoncé une réforme de la politique d'achats publics afin de favoriser les solutions innovantes "locales". "Nos achats publics auront deux tutelles : budgétaire et industrielle", a-t-il indiqué. Troisième axe sur lequel il veut avancer : "la bataille des talents".

Le plan a déjà permis de sécuriser la production d'1 million de véhicules électriques sur les 2 millions visés, grâce à la construction de 4 "gigafactories", d'ouvrir 12 nouveaux instituts hospitalo-universitaires, 5 "bioclusters", de fabriquer 8 biomédicaments sur les 20 prévus pour 2030, ou encore de doubler les capacités de tournage en Europe, avec 3 nouveaux studios de tournage, a énuméré Emmanuel Macron. Parmi les futures innovations de "rupture", il place ses espoirs dans la fusion nucléaire, les aimants supraconducteurs, la capture et le stockage du CO2 ou encore l'espace. "C'est une de nos nouvelles frontières", a-t-il dit, alors que le plan financera le développement d'un avion spatial cargo capable d'acheminer du fret vers de futures stations spatiales...

Emmanuel Macron a aussi annoncé le lancement de "missions d’exploration" de réservoirs d’hydrogène naturel "blanc" sur tout le territoire. Il souhaite aussi une cartographie des ressources minérales indispensables à la transition énergétique.

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