La Cour des comptes alerte sur les surcots du mtro du Grand Paris Express
La Cour des comptes a rendu public, mercredi 17 janvier, un rapport particulièrement alarmiste sur la Société du Grand Paris, chargée de réaliser le Grand Paris Express, ce super métro de 200 km en rocade autour de Paris qui prévoit plusieurs lignes nouvelles, numérotées de 15 à 18, ainsi que des prolongements de l’actuelle ligne 14. Chiffré à 19 milliards d'euros lors du débat public en 2010, le projet était déjà évalué à 22,625 milliards d’euros lorsqu’il a été affiné en 2013. Or, note la Cour, les "coûts prévisionnels (...) n'ont cessé de dériver". "Depuis la fixation d'un objectif de coût par le gouvernement en 2013, celui-ci n'a cessé d'être réévalué pour un dérapage estimé aujourd'hui à près de 13 milliards d'euros", a déclaré le président de la Cour des comptes, Didier Migaud, devant la Ccmmission des finances de l'Assemblée nationale qui l'auditionnait mercredi.
Fragilité des évaluations initiales
"Les évaluations initiales étaient fragiles (...), et les provisions pour aléas et imprévus qu'elles intégraient étaient très inférieures à ce qui est recommandé pour des travaux de cette nature. Les objectifs de coûts ont donc vite été dépassés au fil de l’affinement des études, écrivent les sages de la rue Cambon. Ainsi, la revalorisation des coûts de construction et des acquisitions foncières a fait passer le coût prévisionnel de 22,63 milliards d’euros à 25,14 milliards d’euros début 2017. L’Etat a par ailleurs fait évoluer les coûts à la charge de la SGP en ajoutant à celui de la construction du Grand Paris Express des contributions financières à d’autres projets d’infrastructure de transport en Ile-de-France dont le coût total a atteint 3,4 milliards d’euros en 2017." Le coût total du Grand Paris Express une fois terminé serait finalement de 35,08 milliards d'euros, la facture atteignant même 38,48 milliards en incluant ces "contributions financières".
La pression de l'échéance des JO de 2024
Autre facteur de surcoût, "la réduction des délais de construction du réseau, imposée par l'échéance des Jeux olympiques de 2024, alors que le projet prévoyait initialement une mise en service échelonnée entre 2020 et 2030", a précisé Didier Migaud. Sont théoriquement prévus en effet, dans la perspective des JO, les lignes 14 jusqu'à l'aéroport d'Orly, 15 - une rocade au sud, en construction-, 16 à l'est de l'agglomération parisienne, 17 jusqu'à l'aéroport de Roissy-Charles de Gaulle et 18 entre Orly et le pôle de recherche de Saclay.
"Le réalisme de ce nouveau calendrier (...) apparaît très discutable. Il pose la question de la capacité d'absorption du marché européen des travaux publics (...) et d'un possible renchérissement des prestations", a notamment souligné Didier Migaud, s'inquiétant aussi des risques d'incidents dans "des plannings de construction très serrés".
Risque de "dette perpétuelle"
Concernant l'endettement nécessaire de la SGP pour financer ses investissements, le montant des frais financiers atteindrait selon la Cour "près de 134 milliards d'euros et l'échéance de remboursement complet de la dette serait reporté de 25 ans, de 2059 à 2084". Et encore, des surcoûts ou des variations, "même limitées (...) du rendement des taxes fiscales, des taux d'intérêt ou de l'indice du coût de la construction (pourraient) reculer la dernière année de remboursement au-delà de 2100, voire faire entrer la SGP dans un système de dette perpétuelle", avance la Cour. "Les perspectives de la SGP sont sombres, qu'il s'agisse des coûts, des délais de construction des lignes ou de l'amortissement de la dette", a résumé Didier Migaud.
Recommandations à l'Etat
Tout en émettant "de sérieuses interrogations sur la capacité à respecter les échéances olympiques de 2024", la Cour des comptes recommande donc à l'Etat de renforcer la gouvernance de la SGP, de réévaluer son dimensionnement, "notamment au regard des effectifs de ses prestataires extérieurs" et de "définir une trajectoire pluriannuelle des plafonds d’emplois alloués à la SGP". Elle l’appelle aussi à réviser "le périmètre du projet et de son phasage, faute de quoi il serait contraint d'affecter à l'établissement de nouvelles recettes", à "mettre en place un contrôle renforcé de l’établissement par les tutelles permettant de s’assurer du pilotage rigoureux du projet" et à "élargir et renforcer les compétences du conseil de surveillance de la SGP, notamment en matière d’approbation des mesures d’exécution des décisions d’opération d’investissement, en particulier en matière d’études et de marchés".
"Le schéma d'ensemble n'est pas remis en cause", a indiqué au Sénat, la veille de la publication du rapport, la ministre des Transports, Elisabeth Borne. Le gouvernement a demandé au préfet de la région Ile-de-France de réfléchir à un phasage du projet, qui suscite de fortes inquiétudes parmi les élus locaux. Il devrait donner "le calendrier recalé sur des bases réalistes" dans les prochains jours, a-t-elle noté.
Dans un communiqué, la présidente LR de la région Ile-de-France, Valérie Pécresse, a rappelé "son attachement à la réalisation de l’intégralité des lignes du Grand Paris Express" et demandé à l'Etat "de proposer un plan de redressement rapide pour contenir la dérive des coûts et de tout faire pour limiter les délais de réalisation". Elle réclame aussi "une action volontariste pour accroître les recettes de valorisation (commerces, services, bureaux, logements) pour contribuer à financer les travaux et réduire les retards des chantiers".
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