Rforme de l'aide aux gestionnaires d'aires d'accueil de gens du voyage
Un décret et un arrêté du 30 décembre 2014 modifient les modalités de calcul de l'aide aux gestionnaires des aires d'accueil des gens du voyage. Cette aide est financée par l'Etat et par les CAF et versée aux gestionnaires. Ces derniers sont, pour environ 60%, des collectivités territoriales ou des associations. Dans environ 40% des cas, il s'agit de sociétés privées, qui assurent cette prestation pour le compte de collectivités soumises à la loi Besson.
D'un financement forfaitaire à un financement variable
La principale innovation du décret est de passer - conformément à l'article 138 de la loi du 29 décembre 2013 de finances pour 2014 (devenu l'article L.851-1 du Code de la sécurité sociale) - d'un financement forfaitaire à un financement plus personnalisé. Le décret prévoit ainsi que, pour chaque aire d'accueil, l'aide mensuelle est égale à l'addition de deux montants. D'une part, "un montant fixe déterminé en fonction du nombre total de places effectivement disponibles et conformes aux articles 2 et 3 du décret n°2001-569 du 29 juin 2001 relatif aux normes techniques applicables aux aires d'accueil des gens du voyage". D'autre part, "un montant variable déterminé en fonction de l'occupation effective de ces places [...], calculée à partir du taux moyen d'occupation mensuel des places".
L'arrêté du 30 décembre 2014 prévoit, pour le montant mensuel fixe, une somme mensuelle de 88,30 euros par places disponibles et conformes et, pour le montant variable, une somme mensuelle de 44,15 euros pour 100% d'occupation (montant qui va donc diminuer si le taux d'occupation est inférieur à 100%). En d'autres termes, le décret et l'arrêté du 30 décembre 2014 introduisent jusqu'à un tiers de part variable dans le montant total de l'aide mensuelle versée aux gestionnaires d'aires d'accueil pour les gens du voyage.
Le contenu de la convention précisé
L'article 138 de la loi de finances pour 2014 prévoyait également que "le versement de l'aide est subordonné à la signature d'une convention entre l'Etat et [les] gestionnaires". Le décret et l'arrêté du 30 décembre 2014 précise donc le contenu de cette convention annuelle, passée entre le gestionnaire et le préfet du département d'implantation.
La convention fixe le montant de l'aide mensuelle, selon les modalités de calcul exposées ci-dessus. Elle précise également les capacités d'accueil de l'aire - et notamment le nombre de places conformes effectivement disponibles mois par mois -, la prévision d'occupation mensuelle de ces places, les modalités de régularisation du versement de l'aide, les conditions financières et la liste des justificatifs à fournir par le gestionnaire à la CAF et au préfet, ainsi que la définition détaillée du droit d'usage. Elle indique aussi le titre d'occupation des usagers, les obligations relatives à la maintenance et à l'entretien des locaux de l'aire, la durée annuelle de la convention, la clause de résiliation et le contrôle de l'autorité compétente.
Chaque année, avant le 15 janvier, le gestionnaire de l'aire doit adresser à la Caf et au préfet une déclaration - dont l'arrêté fournit le modèle - apportant tous les éléments et les pièces justificatives permettant de mesurer l'activité de l'année précédente.
Dissiper les zones d'ombre
Cette réforme est clairement destinée à introduire davantage de transparence dans la gestion des aires d'accueil, financées à 80% par de l'argent public (le reste venant notamment des loyers versés par les personnes accueillies). Dans un rapport public de 2012, la Cour des comptes a en effet pointé du doigt certains dysfonctionnements dans la gestion privée des aires d'accueils (voir notre article ci-contre du 11 octobre 2012). Certaines grandes entreprises assurent certes des prestations de qualité, à l'image de SG2A L'Hacienda, qui gère environ 200 aires et plus de 6.300 places, réparties dans plus de quarante départements. Cette société est d'ailleurs aujourd'hui une filiale du groupe Saur, troisième acteur de la distribution d'eau en France.
Mais d'autres sociétés - souvent nettement plus petites - sont beaucoup moins transparentes. Le rapport de la Cour des comptes de 2012 visait ainsi nommément la société Gens du Voyage, basée à Marseille et dont, "en 2009, près d'un tiers de [son] chiffre d'affaires (3,25 millions d'euros) est revenu sous forme de rémunération ou de distribution de dividendes à la gérante de la société et n'a pas été réinvesti dans l'activité".
Le rapport de la Cour des comptes concluait sur la nécessité "que l'Etat s'implique dans ce secteur d'activité encore inorganisé et en fort développement, qui n'est pas exempt de risques pour les finances publiques et la qualité du service rendu aux usagers". C'est en partie chose faite avec le décret et l'arrêté du 30 décembre 2014.
Jean-Noël Escudié / PCA
Références : décret 2014-1742 du 30 décembre 2014 relatif à l'aide versée aux gestionnaires d'aires d'accueil des gens du voyage ; arrêté du 30 décembre 2014 portant application des articles R.851-2, R.851-5, R.851-6 du Code de la sécurité sociale (Journal officiel du 31 décembre 2014).
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